Aujourd’hui j’ai envie de partager avec vous un nouveau portrait, celui de Pauline. Elle est la fondatrice du café-tricot le Fil Café à Bayonne et est à également créé le groupe Zéro Déchet Bayonne sur Facebook. Elle a aussi un podcast, un blog, une newsletter et plein de tricots en-cours (je crois qu’on dit ça comme ça). Bref, je me demande souvent comment elle arrive à tout faire (et à tout faire bien qui plus est…), du coup j’ai voulu lui poser quelques questions sur son aventure et partager ça avec vous. Voici donc l’interview de Pauline !
Je sais que tu es comme les chats et que tu as déjà eu plusieurs vies professionnelles… Peux-tu en quelques lignes me raconter ton parcours ?
J’ai fait des études techniques (feu le Bac STI) et un BTS Agencement par alternance : pour résumer, je dessinais des plans de menuiserie sur ordi. A la fin des 2 ans du BTS j’ai senti que je n’allais pas vraiment m’épanouir là-dedans. J’ai tout arrêté, passé une année sabbatique, puis à la rentrée suivante j’ai refait un an d’étude pour devenir bibliothécaire, un métier que j’ai ensuite exercé pendant 8 ans. Et puis pareil, à un moment j’avais le sentiment d’avoir fait le tour et de végéter sur place. Alors j’ai encore changé de voie. Mais toutes mes expériences m’ont appris des choses dont je me suis resservie plus tard, et dont je me servirai peut-être encore à l’avenir.
Qu’est-ce qui t’a donné envie de te lancer dans l’aventure du Fil Café ? As-tu eu un déclic ou est-ce que ça a été plutôt progressif ?
Ça a été plutôt progressif. Avant de décider de changer de métier, je suis longtemps allée travailler sans aucune motivation. J’ai eu un espèce de déclic fin 2015, mais c’était plutôt du style « trouve-toi une autre voie professionnelle», je n’avais aucune idée précise de ce vers quoi je devais aller. J’ai fait un bilan de compétence en 2016 et c’est à ce moment-là que l’image d’un magasin s’est formée dans ma tête. Mais entre les premiers questionnements et l’ouverture du magasin, il s’est passé entre deux et trois ans, je dirais.
Je sais que tu es très regardante sur l’éthique derrière la production de laine, peux-tu m’en dire plus sur la façon dont tu choisis tes produits ?
Pour être honnête, actuellement je ne suis pas satisfaite à 100% de mon offre de laine. L’idéal serait :
- uniquement des matières naturelles bio,
- du local ou tout du moins du français (de l’élevage jusqu’à la transformation),
- des animaux bien traités (pas de mulesing par exemple),
- des teintures végétales et/ou éco-responsables.
J’ai un peu de tout ça dans chaque gamme mais jamais tout à la fois, et pas encore de bio. Pourtant il y a des éleveurs.ses en France qui proposent ce type de produits, mais surtout en vente directe car c’est là qu’ils ou elles s’en sortent le mieux financièrement. Et pour arriver à vendre leurs fils en boutique, il faudrait que je réduise beaucoup ma marge, or avec une entreprise toute jeune et un peu fragile (Le Fil Café a à peine plus d’un an et je ne me rémunère pas), ce n’est pas envisageable. Mais même si je n’arrive pas encore à avoir l’offre idéale, tous ces critères forment une sorte de ligne directrice qui m’aide à chercher dans le bon sens et à prendre des décisions.
Le Zéro Déchet c’est plus facile à la maison ou au Fil Café ?
C’est pareil, dans les deux cas il y a des réussites et des échecs.Au Fil Café, j’ai trouvé sans difficulté des fournisseurs pour le salon de thé, en vrac, en bio, en local. Mais c’est beaucoup plus compliqué d’échapper aux emballages pour la petite mercerie ou pour les pelotes de laine qui sont conditionnées sous plastique dans les filatures. J’ai écrit un article de blog sur ce sujet d’ailleurs.
A la maison, ce n’est pas parfait, les semaines sont chargées et les imprévus nombreux, mais on fait comme on peut, et c’est déjà bien !
D’ailleurs, en parlant de café … T’es plutôt thé ou café ?
J’aime bien les deux, mais autant je peux me passer de thé, autant je ne démarre jamais une journée sans café.
Bon sinon, vu tout ce que tu gères tu m’as l’air d’être une pro de l’organisation, tu aurais un secret pour nous tous ?
C’est vrai que je suis super organisée maintenant, mais ça n’a pas toujours été le cas. J’ai commencé à m’organiser quand je me suis rendue compte que mon côté distrait et bordélique me mettait dans des situations de stress ingérables.En fait ce qui marche, c’est surtout de respecter son propre rythme. Des solutions d’organisation il y en a plein, il faut en tester plusieurs pour trouver celle qui marche pour soi-même. Et si ça ne marche pas, c’est parce que la solution n’est pas adaptée à soi, et non parce qu’on est « une mauvaise personne qui ne sait pas s’organiser ». Ou alors c’est qu’on veut faire trop de choses. Il m’a fallu un peu de temps pour le comprendre, arriver à m’écouter et apprendre à renoncer
L’agenda papier marche bien dans mon cas. Le week-end, je le laisse derrière moi au magasin pour faire une vraie coupure. J’ai acheté celui-là écologique et fabriqué en France, sur le conseil d’une cliente. Il y a dedans des outils pour s’organiser (au choix) par mois, par semaine et par jour. Pour ma part :
- Je fais des listes de trucs à faire par mois, rangés par priorité. Je le fais parfois plusieurs mois à l’avance.
- Au début de chaque semaine, je fais une to-do list en fonction du temps disponible, des priorités, de ma motivation aussi. Ca par contre, je ne le fais pas en avance, j’attends vraiment le début de la semaine pour m’y mettre, pour m’adapter au contexte.
- Je restreins volontairement cette to-do list pour ne pas me mettre une pression de dingue, et pour ne pas culpabiliser quand tout n’est pas rayé à la fin de la semaine. Donc je la limite à ce que je suis quasi-sûre de pouvoir faire. Et je l’écris au crayon à papier pour pouvoir la réévaluer en cours de semaine s’il y a un imprévu.
- J’organise mes journées selon mon propre rythme : par exemple je sais que je suis plus efficace le matin, donc c’est là que j’expédie les affaires courantes, les factures, les bricoles urgentes. L’après-midi je me consacre à des tâches plus longues, comme écrire un article de blog ou la newsletter.
- A la fin de chaque journée je note ce que j’ai effectivement réalisé, afin de ne pas voir uniquement ce qu’il reste à faire.
Ensuite il ne faut pas se leurrer, pour arriver à tout faire, j’ai dû renoncer à des loisirs comme le piano ou la couture. Je n’ai pas d’enfants, donc une certaine liberté de mouvement et d’imprévu. Je ne fais pas toujours tout bien non plus : le groupe Facebook Zéro Déchet, j’aimerais y être plus présente, l’animer davantage, mais je ne trouve pas le temps. Et je prends parfois de mauvaises décisions pour mon entreprise. Je ne veux pas incarner la fille qui réussit tout, ce n’est pas vraiment moi et ça ne ferait que culpabiliser les autres. J’essaye, parfois j’y arrive et j’en suis fière, parfois je n’y arrive pas et je me décourage, avant d’essayer à nouveau.
Enfin pour finir, est-ce que tu pourrais me dire quelle est la meilleure leçon que tu tires de l’année passée et que tu donnerais à quelqu’un qui voudrait se lancer dans l’aventure entrepreneuriale ?
J’ai compris un truc un peu simplet, mais vraiment important : le seul avis qui compte, c’est le mien. Au tout début j’ai commis l’erreur de me forcer à travailler avec un avocat avec qui le feeling ne passait pas vraiment, et je regrette de ne pas avoir fait confiance à mon instinct à ce moment-là. Donc mon conseil serait de s’entourer de gens avec qui on s’entend bien, et d’écouter son propre avis un peu plus fort que celui des autres.Et puis cette nouvelle voie professionnelle m’a appris un truc sur moi : en toute circonstance, je suis capable de « rebondir » et de me réinventer. C’est un peu mon super pouvoir. Je ne dis pas que c’est facile, mais je sais que j’en suis capable. Le Fil Café n’existera peut-être pas toujours mais moi je serai toujours là, à inventer autre chose.
As-tu des livres, newsletters, podcasts et autres comptes à recommander ?
J’aime beaucoup :
- la newsletter « La Vraie Dose », sur le quotidien des entrepreneurs.ses où j’ai pioché l’idée de la to-do list inversée (noter ce que l’on a déjà fait au lieu de ce qu’il reste à faire)
- le podcast « Sois gentille, dis merci, fais un bisou » de Clémence Bodoc pour Madmoizelle
- la chaîne Youtube d’Ophélie – Ta Mère Nature
- le podcast “Kiffe ta race” de Grace Ly et Rokhaya Diallo
Merci encore Pauline pour ton temps et ta disponibilité ! J’espère que cette interview vous aura inspiré autant que moi 🙂